En avril dernier, la Cour européenne des droits de l’homme rendait une décision historique en condamnant l’État Suisse, coupable selon elle de ne pas en faire assez pour adapter le pays aux changements en cours.
Que dit au fond cet arrêt, et qu’est-ce que cette jurisprudence pourrait changer à moyen et long termes ?
Un phénomène appelé à prendre de l’ampleur ? Pour quels impacts réels ?
Tandis que les effets du changement climatique se précisent et que l’adaptation s’annonce plus difficile que prévu, le droit intègre peu à peu la menace climatique dans son champ de compétences. En témoigne la récente condamnation de la Suisse par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Cette dernière fait suite à une requête introduite par quatre femmes et une association suisse, qui s’inquiétaient des conséquences du réchauffement climatique sur leurs conditions de vie, et reprochaient à la Suisse son inaction.
Comme l’explique l’avocat Sébastien Mabile, « la CEDH avait déjà pu juger par le passé que des pollutions environnementales constituaient une violation de l’article 8 » (relatif au respect de la vie privée et familiale). « Mais c’est la première fois que ce cadre est élargi au cas du climat ».
L’inaction climatique reconnue comme atteinte aux droits humains
Dans son arrêt, la Cour consacre ainsi « un droit à une protection effective, par les autorités de l’État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur la vie, la santé, le bien-être et la qualité de vie. » Pour l’avocat Arnaud Gossement, « ce qui est fondamental, c’est que la CEDH étend les droits de l’homme à la question climatique ». Si un tel lien avait déjà été établi par des juridictions nationales, comme aux Pays-Bas ou en Belgique, ce n’était pas le cas au niveau international.
Le délégué général de l’ONG Notre affaire à tous explique que « c’est un coup de tonnerre, car les États ont tendance à jouer la carte de la déconnexion entre droits humains et droits climatiques. Au-delà du cas suisse, la décision de la CEDH affirme que tous les États signataires de la Convention européenne des droits de l’homme sont condamnables en cas d’inaction climatique. »
Une reconnaissance de la réalité scientifique par le droit international
Pour Laurence Burgorgue-Larsen, professeure de droit public à l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne, l’arrêt de la CEDH présente un grand avantage : il « reconnaît à plusieurs endroits, de manière très solennelle, la réalité scientifique du risque climatique, en mentionnant les rapports du GIEC et la grande qualité de ces travaux. »
Qui plus est,la Cour définit de manière précise les réponses que les États doivent apporter : adopter un calendrier pour atteindre la neutralité carbone, préciser le budget carbone restant, se fixer des objectifs intermédiaires, les mettre à jour et démontrer leur mise en œuvre. Autant d’éléments que la Suisse n’avait pas suffisamment intégrés.
Des conséquences encore incertaines pour les États condamnés
D’autres voix sont en revanche plus pessimistes quant à l’impact d’une telle décision. Le juriste Sébastien Duyck rappelle que les jugements de la CEDH ont une valeur contraignante et s’imposent aux États, qui ne peuvent plus faire appel. Mais le spécialiste du droit constitutionnel Pascal Mahon pense qu’« il est trop tôt aujourd’hui pour dire ce qui va changer concrètement ».
En effet, si la Suisse a l’obligation de mettre en œuvre cet arrêt, elle conserve le choix des moyens : « Le Conseil fédéral devra analyser la situation, voir quelles sont les mesures à prendre, proposer des mesures d’ordre législatif, par exemple au Parlement ». Et de conclure : « On ne peut pas dire aujourd’hui que cet arrêt va changer du jour au lendemain beaucoup de choses. » La formation de droite radicale majoritaire en Suisse, l’UDC, a d’ailleurs réagi violemment à cette nouvelle, en réclamant que la Suisse quitte le Conseil de l’Europe.
Enfin, une autre limite est pointée par la chercheuse Marta Torre-Schaub : le nombre de recours devant la CEDH pourrait être limité par une « jurisprudence qui reste très stricte en termes de recevabilité des plaintes ». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle deux autres affaires, jugées en même temps que le cas suisse, ont été rejetées par cette juridiction.
Le droit avance… mais est-ce assez rapide ?
Si le droit progresse, reste donc à savoir s’il évoluera assez vite pour faire face à l’urgence climatique. Mais en matière de conduite du changement, les décideurs sont prévenus : à travers la jurisprudence, les différentes autorités judiciaires produisent chaque jour un droit effectif et opposable, devant lequel leur éventuelle inaction, en matière d’adaptation ou d’atténuation, pourrait à court ou moyen terme être sanctionnée.
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