Avant la marche pour l’égalité, j’étais déjà un militant. Je militais particulièrement pour les droits de l'homme, et plus précisément contre la politique raciste en Afrique du sud et pour la libération de Mandela. En fait, j’étais militant avant d’être étudiant, j'avais déjà la fibre du militantisme avant de m'inscrire à l'ISSA. Lorsque je suis arrivé du Sénégal en 1981, j’ai d’abord été hébergé chez un ami à la Croix Rousse et j’ai cherché, non sans difficultés, un hébergement. Je l’ai trouvé aux Minguettes, c’est là où, pour les étrangers, c’était le plus facile de trouver une chambre. J'ai donc habité au foyer Sonacotra de la Darnaise, un des quartiers de la ZUP des Minguettes, et je m'intéressais à la vie de la cité.
Les contacts et les connaissances se faisaient principalement dans le bus, pendant les trajets qui étaient très longs. Et comme dans les banlieues, contrairement aux arrondissements de centre-ville, le contact se faisait très facilement et les "attroupements" ne choquaient personne, tout le monde pouvait participer aux mobilisations. Par ailleurs, j’ai retrouvé là quelques Sénégalais, assez isolés comme moi, et nous formions comme une famille, une petite bande qui s’entraidait.
Très rapidement, j’ai intégré l’AESF, l’Association des Etudiants Sénégalais Français dont j’ai été le secrétaire général de la section de Lyon, puis la fédération des étrangers d’Afrique. À l’ISSA, j’ai également rencontré des Kanaks qui habitaient aussi aux Minguettes, non pas en foyer, mais dans de vrais logements auxquels ils avaient pu accéder puisqu’ils étaient français, et qui militaient pour l’indépendance de leur île. Il faut dire que, comme l’indépendantiste Jean-Marie Tjibaou avait fait ses études à l’ISSA, notre école était très connue en Nouvelle-Calédonie, et elle accueillait à l’époque de nombreux étudiants kanaks. Je baignais donc dans cet esprit de lutte et c’est tout naturellement que j’ai rejoint la marche pour l’égalité.