Ville intelligente et utilité sociale
Dans l’article intitulé « L’ESS, une ressource pour la « Ville Intelligente » : un cadre d’analyse », Isabelle Dedun (Lyon 2 / COACTIS), Mariétou Diagne (TUBA), Alexandrine Lapoutte (Lyon 2 / COACTIS) évoquent le concept d’utilité sociale pour évaluer les innovations portées par la ville intelligente. Elles soulignent que le concept de smart city s’est déplacé d’une conception très technocentrée vers une conception faisant davantage de place aux citoyens. Une approche par l’utilité sociale fait apparaître des gains pour les habitants de la ville intelligente. Par exemple, les dispositifs techniques permettant de collecter et d’ouvrir les données publiques favorisent la création de nouveaux services aux usagers. Autre exemple, l’application des stratégies de ville intelligente aux mobilités permet de fluidifier la ville, de maximiser le fonctionnement des offres de mobilités douces, de faciliter l’intermodalité et l’information aux usagers, etc. Mais si on constate bien ces gains, il faut aussi conclure que l’utilité sociale ne se superpose pas totalement à la notion d’inclusion, d’où l’importance d’orienter plus fortement les critères d’évaluation de la ville intelligente vers l’inclusion.
La ville inclusive comme nouveau modèle de ville intelligente
Isabelle Dedun, Mariétou Diagne, Alexandrine Lapoutte proposent d’ajouter un quatrième modèle à une schématisation de la ville intelligente qui en distinguait trois et que nous avions proposée en 2016 pour la Métropole. Ainsi, outre la « techno-cité », développée par les équipementiers de l’informatique et de la ville, la « ville collaborative », issue des contributions des usagers, et la « e-cité », portée par la puissance publique, les auteures proposent de distinguer la « ville inclusive », telle qu’elle émergerait d’une articulation particulière de l’ensemble des trois premiers modèles et de la collaboration de leurs acteurs.
On pourrait objecter aux auteures que les typologies initiales reflétaient des systèmes d’acteurs et que la catégorie « ville inclusive » n’est pas une catégorie d’acteurs mais une finalité. Il y aurait donc un brouillage des catégories acteurs / finalités. De plus, on pourrait vouloir conserver au politique sa légitimité de garant du bien commun et maintenir que c’est à lui que revient le rôle de régulateur l’amenant à orienter le développement de la ville intelligente vers une finalité d’inclusion. Pour autant, le grand intérêt de cette contribution est de placer la question de l’inclusion au cœur de la démarche de ville intelligente et de proposer des outils pour cela.
Le rôle de l’économie sociale et solidaire
En effet, ainsi que l’indiquent les auteures, la possibilité de cette ville inclusive, fruit hybride de la participation de l’ensemble des acteurs (équipementier / habitants / institution), repose sur un enjeu clé : celui « de savoir comment équilibrer les différentes attentes des différents acteurs impliqués dans la planification et exécution intelligentes de la ville ». Pour les auteures, l’économie sociale et solidaire pourrait tenir cette place et notamment du fait « de sa capacité, du moins son expérience, à hybrider les logiques ». Ainsi, parce qu’elle est potentiellement compatible avec les attentes de chacun des acteurs, l’économie sociale et solidaire pourrait être un dénominateur commun propre à orienter le développement des villes intelligentes vers plus d’inclusion.