Daniel Priolo : Changement de comportement et contradictions internes
Interview de Daniel Priolo
Enseignant-chercheur en psychologie sociale
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Texte d'Astrid Hopfensitz
Comme ce sont des méthodes douces d’incitation, les nudges s’appuient sur des mécanismes psychologiques. En effet, on sait que les humains sont souvent influencés par nombreux biais lors d’une prise de décision. Par exemple, « qui » donne l’information ou « comment » est-elle affichée ? Quelles sont les normes sociales en vigueur, quelles émotions positives cette action va-t-elle produire, ou encore quelle image de moi-même me donnera-t-elle ?
Un des exemples le plus probant est celui du don d’organes. Si la majorité des gens est pour, le coût psychologique et symbolique rend parfois le passage à l’acte complexe. Il n’est pas toujours facile de se projeter dans la mort, surtout lorsque l’on est jeune, et de mettre en place des démarches pour dire explicitement que l’on donnera ses organes en cas de décès accidentel par exemple. Certains pays contournent donc cette difficulté avec les nudges et instaurent le don d’organes par défaut.
En d’autres termes, si l’on ne dit rien, cela veut dire que l’on est d’accord.. En revanche, on doit le signaler si on ne le souhaite pas. C’est un choix par défaut. Dans ce cas, ce nudge fonctionne très bien car il ne sert pas à convaincre les personnes, mais à accentuer un comportement qui est déjà plus ou moins accepté. On le voit parfaitement, c’est un véritable coup de pouce à l’évolution des comportements vers ce que la puissance publique estime être la bonne solution pour la collectivité.
Les choix par défaut ne sont pas le seul mécanisme sur lequel s’appuient les nudges, car si l’on doit répéter l’action tous les jours, on risque de se lasser du choix par défaut et être tenté de le changer. Par exemple, si les imprimantes sont réglées par défaut sur l’impression recto-verso, on peut, en faisant des tirages quotidiens, modifier ce réglage et là, le nudge « par défaut » sera inefficace. Les nudges portent cependant en eux une véritable promesse : celle de venir en complément de politiques publiques installées. Leur efficacité est incontestable lorsque les personnes sont déjà motivées. C’est vraiment ce qui a été observé avec le dispositif Velo’v : réduire le coût financier et psychologique pour faciliter l’adoption d’un mode doux de déplacement. Il est évident que les nudges ne peuvent pas induire des changements radicaux de comportements, ni être des solutions universelles, mais ils viennent en appui.
Un autre exemple emblématique : celui du tri où des politiques publiques sont déjà mises en place. En complément, on peut accentuer des modes de faire auprès de personnes qui sont déjà convaincues, à des degrés plus ou moins forts, de l’importance du tri. On peut systématiser leur pratique en leur proposant de rendre l’acte de trier moins coûteux encore. Si ces personnes trouvent fastidieux de trier en dehors du domicile, on met à leur disposition des poubelles plus colorées, plus nombreuses voire dans certains cas, on met en place des dispositifs ludiques. Ainsi, le nudge n’est pas là pour changer fondamentalement le comportement des citoyens, mais pour les inciter à être plus vertueux sans les contraindre. Et dans ce contexte là, il ne peut qu’atteindre son but.
Si l’on reste dans ce cadre, cela ouvre des perspectives prometteuses. De nombreux pays européens comme l’Angleterre, l’Allemagne, les Pays-Bas ont mis en place des nudges Unit internes aux instances démocratiques qui réfléchissent à ces méthodes d’incitation. De plus en plus, dans les ministères ou les institutions, on commence à en discuter et à observer les situations où cela fonctionne. Des tests dans des domaines différents peuvent être conduits et induire, à terme, des changements dans les comportements.
Interview de Daniel Priolo
Enseignant-chercheur en psychologie sociale
Interview de Benoit Granier
Docteur en Science Politique
Interview de Susana Jourdan et Jacques Mirenowicz
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Texte d'Astrid Hopfensitz
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