Avant d’entrer dans le sujet de ce dossier, nous vous présentons la thèse de Benjamin Lippens
La question des "Banlieues"
Depuis les années 1980, la question des "banlieues" fait l’objet d’une attention politique et médiatique intense (COLLOVALD, 2001). Elle s’exerce notamment par la diffusion d’images de heurts opposant des jeunes majoritairement issus de l’immigration postcoloniale et des policiers, sur un fond d’incendies de voitures et de dégradations d’équipements publics aux effets spectaculaires. Ces "violences urbaines" ont d’abord concerné la région lyonnaise (Vaulx-en-Velin en 1979, Vénissieux en 1981), puis se sont manifestées dans de nombreuses cités françaises, de manière répétée (BONELLI, 2008).
Les décideurs publics se sont rapidement emparés de ces événements pour développer ce que l’on nomme la "politique de la ville". Des opérations "anti-été chaud", la création de ZEP, la rénovation urbaine avec la création de l’ANRU, les rapports Schwartz, Bonnemaison, Dubedout, tous contribuent à un endiguement des inégalités sociales et territoriales qui se sont installées en France (TISSOT, 2007). La politique de la ville recouvre un champ d’intervention aussi large que la réhabilitation des logements et l’urbanisme, l’action sociale et culturelle, l’école, l’emploi, et l’insertion professionnelle, la prévention de la délinquance et la sécurité (AVENEL, 2010).
Symbole de ce "profond malaise social" (MOHAMMED et MUCHIELLI, 2007), les habitants des quartiers populaires se mobilisent pour interpeller la société française sur leurs conditions d’existence, subissant à la fois la relégation socio-spatiale et des formes de discriminations raciales agissant comme un "obstacle supplémentaire" (SANTELLI, 2007b) aux trajectoires professionnelles, scolaires et sociales des populations immigrées ou de descendants d’immigrés (Marche pour l’égalité en 1983, collectifs de soutien aux jeunes violentés ou tués par la police, etc.).
Les sciences sociales ont également investi cette problématique de "la banlieue", dont l’ouvrage de François Dubet (DUBET, 1987) constitue un des premiers travaux sur la jeunesse des quartiers populaires. D’autres études sur les trajectoires de ces "jeunes des cités" ont vu le jour, notamment celle de Stéphane Beaud, qui analyse les effets ambivalents d’une politique publique de réussite scolaire (80% de réussite au Baccalauréat) sur les jeunes d’un quartier populaire de la région de Montbéliard (BEAUD, 2002). Fabien Truong, quelques années plus tard a suivi une cohorte de jeunes adolescents de Seine-Saint-Denis, de 2005 à 2015. Il a dressé différents portraits d’élèves de lycée général de banlieue et a mis en lumière leurs stratégies de réussite (TRUONG, 2015). On peut également citer les travaux de Marwan Mohammed sur les bandes de jeunes (MOHAMMED, 2011 ; 2016). Ces exemples ne sont bien évidemment pas exhaustifs et les recherches s’intéressants aux cités HLM, à leurs habitants et aux transformations urbaines et sociales sont profuses.
Dans ce contexte d’attention croissante de la sociologie aux quartiers populaires, Emmanuelle Santelli a cherché à objectiver le parcours de jeunes descendants de l’immigration maghrébine, ayant passé leur enfance dans un même quartier de la banlieue lyonnaise et appartenant à la même génération. Son enquête réalisée en 2003 et publiée en 2007 a permis d’objectiver la place des "jeunes de cités" issus de l’immigration maghrébine dans la société française sous l’angle de leurs parcours scolaires, professionnels, résidentiels et de leur rapports au quartier (SANTELLI, 2007a).
Près de quinze ans plus tard, Benjamin Lippens [1] prend la suite de l’enquête dans sa thèse démarrée en 2019 et intitulée Grandir en banlieue : parcours, construction identitaire et positions sociales. Le devenir d’une cohorte. Son travail consiste à suivre les mêmes personnes interrogées par Emmanuelle Santelli en 2003.
Que sont devenus ces jeunes de 20-29 ans désormais adultes de 36-45 ans ?
Alors qu’en 2003, les membres étaient des jeunes adultes pour lesquels se posait la question de leur manière de prendre place dans la société (SANTELLI, 2003, 2009), en 2019, cette population a atteint un âge où les positions obtenues reflètent des situations sociales de manière durable ; les inflexions dans les parcours de vie étant plus rares que durant la période de jeunesse, moins prévisibles. Par ailleurs, le passage dans "âge adulte" [2] transforme les rapports à la société. Les contraintes sociales et les aspirations ont évolué pour beaucoup de membres de la cohorte [3]: vivre en couple, élever ses enfants, poursuivre une carrière professionnelle, s’occuper des parents vieillissants constituent de nouvelles préoccupations.
Cette thèse vise donc à comprendre ces parcours : comment se sont construites leurs trajectoires dans les nombreux domaines de la vie sociale (emploi, famille, engagement politique et citoyen, religion…) ? Est-ce que le fait d’avoir grandi en banlieue continue de caractériser leur parcours ? Quel a été le rôle des institutions publiques dans leurs trajectoires ?
En ce sens, cette recherche est aussi une façon d’évaluer l’effet des politiques publiques, dont celle de la ville, sur un temps long et l’impact des mesures du droit commun pour cette population qui a pour particularité d’avoir grandi dans un quartier de banlieue mais qui, à la date de cette nouvelle phase de l’enquête, vit très majoritairement hors de ce quartier.
Les parcours relèvent à la fois d’expériences individuelles, de contingences, d’imprévisibilités, de hasard et d’opportunités durant lesquelles les tendances à agir sont conditionnées par des dispositions acquises durant la socialisation et des effets de contexte situationnels, locaux et nationaux, à commencer par la structure du marché du travail (déterminante pour comprendre les ressorts de la mobilité sociale).
Dès lors, cette enquête interroge ce qu’aucun autre travail en sciences-sociales n’a encore fait : suivre dans une perspective d’analyse longitudinale le devenir d’un groupe de personnes ayant passé leur enfance dans un même quartier, depuis leur jeunesse jusqu’à leur âge adulte.
[1] Doctorant en sociologie au centre Max Weber (rattaché à l’Université Lyon II) et en CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la Recherche) à la Métropole de Lyon.
[2] Le sociologue Olivier Galland définit le passage à l’âge adulte une fois franchi ces trois étapes : la décohabitation, l’obtention d’un emploi stable, la mise en couple.
[3] Le terme de cohorte renvoie à un dispositif d’enquête permettant de sélectionner des personnes appartenant à une même génération et ayant vécu un même évènement.
Références bibliographiques :
AVENEL Cyprien, Sociologie des quartiers sensibles, Paris, A. Colin, Coll. « 128 », 2010, 3e édition.
BEAUD Stéphane, « 80 % au bac » et après ? : Les enfants de la démocratisation scolaire, Paris, La Découverte, 2002.
BONELLI Laurent, La France a peur. Une histoire sociale de l'‘‘insécurité’’, La Découverte, coll. « cahiers libres », 2008.
COLLOVALD Annie, « Des désordres sociaux à la violence urbaine », Actes de la recherche en sciences sociales 2001/1 (n° 136-137), p. 104-113.
DUBET François, La Galère : jeunes en survie, Fayard, 1987.
HAJJAT Abdellali, MOHAMMED Marwan, Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le "problème musulman", Paris, La Découverte, coll. « Cahiers libres », 2013
LAPEYRONNIE Didier, Ghetto urbain. Ségrégation, violence, pauvreté en France aujourd’hui, Paris, Robert Laffont, 2008.
MOHAMMED Marwan et MUCCHIELLI Laurent, « 6. La police dans les « quartiers sensibles » : un profond malaise », in Véronique Le Goaziou et Laurent Mucchielli , Quand les banlieues brûlent..., La Découverte « Sur le vif », 2007 p. 104-125.
MOHAMMED, Marwan, et Laurent MUCCHIELLI. Les bandes de jeunes: des" blousons noirs" à nos jours. La Découverte, 2016.
MOHAMMED Marwan. La formation des bandes: entre la famille, l’école et la rue. 1re éd, Presses universitaires de France, 2011.
MOHAMMED, Marwan. « Schémas de sortie de bande : de l’usure de la rue à l’ouverture sociale » Les sorties de la délinquance. Théories, méthodes, enquêtes. Paris : La Découverte. 2012, p. 182-209.
SANTELLI, Emmanuelle, “Du modèle d’intégration à l’analyse des manières de prendre place dans la société : le cas des descendants d’immigrés maghrébins”, Migrations Société, vol. 15, n° 86, mars-avril 2003, pp. 69-82.
SANTELLI, Emmanuelle. Grandir en banlieue: parcours et devenirs de jeunes Français d’origine maghrébine. CIEMI, 2007a.
SANTELLI Emmanuelle, « Les jeunes de banlieue d’origine maghrébine : entre galère et emploi stable, quel devenir ? », Revue européenne des migrations internationales, vol. 23 - n°2 | 2007b p. 58.
SANTELLI Emmanuelle, Prendre place, entre ressources inégales et mobilités. Réflexions méthodologiques sur les parcours des descendants d’immigrés, Habilitation à diriger des recherches en sociologie, 2014.
TISSOT Sylvie, L’état et les quartiers: genèse d’une catégorie de l’action publique, Seuil, 2007.
TRUONG Fabien, Jeunesses françaises. bac+5 made in banlieue, Paris, La découverte, 2015.
WACQUANT, Loïc. « Les deux visages du ghetto: construire un concept sociologique ». Actes de la recherche en sciences sociales, no 160, 2005, p. 4‑21.
DOSSIER 3 : La question de la citoyenneté et les manières de prendre place dans la société française
Ici se pose la question des conditions de la citoyenneté [1] des descendants d'immigrés : comment s’est-elle construite ? L’enquête d’Emmanuelle Santelli a permis de montrer que l’expérience de la stigmatisation et des discriminations liées à l’origine résidentielle, sociale et étrangère était commune à tous les enquêtés, toutes trajectoires confondues.
Qu’en est-il aujourd’hui ? Comment trouver et prendre sa place dans la société française lorsque l’on est descendant d’immigrés, issu d’un quartier de banlieue et d’origine sociale modeste ?
Cette interrogation est d’autant plus forte au regard du contexte international et national (notamment les vagues d’attentats depuis 2012) où être musulman expose à de nombreux amalgames, alors que certaines politiques publiques mettent en spectacle des décisions telles que l’arrêté "anti-burkini", au nom d’une "laïcité" instrumentalisée, et contribuent à alimenter un contexte « islamophobe » (HAJJAT, MOHAMMED, 2013).
[1] On peut envisager la citoyenneté selon ses dimensions juridiques (ensemble de droits et de devoirs conféré par l’appartenance à un corps de citoyens), sociales (sentiment d’appartenance, rôles et normes) et politiques (participation à la vie et aux décisions collectives).
Liste des ressources
Identité et citoyenneté
Socialisation et évolution du rapport à la nation des générations issues de l'immigration
Cette synthèse bibliographique (2016) sur les valeurs des descendants d'immigrés réalisée en 2016 vise à rendre compte de la façon dont les sciences sociales et politiques traitent de la question générationnelle dans la littérature académique sur les descendants d’immigrés.
Grandeur et limites du multiculturalisme
Dans ce texte de 2012, l’anthropologue et ethnologue africaniste français Jean-Loup Amselle démontre la grande perversité des jeux de la stigmatisation, qu’ils soient fondés sur l’affirmation d’une identité blanche et catholique ou sur l’idéal, voire le dogme, d’une société multiculturelle.
Multiculturalisme et progression de l’ethnicisation de la société en France
Dans cette interview de 2012, Mohamed Cherif Ferjani, politologue, expert du monde arabe présente son appréciation sur la progression du multiculturalisme en France. Il réagit aux propos de Jean Loup Amselle qui affirme que le multiculturalisme a échoué en France en favorisant le développement d’une identité blanche et chrétienne et induit une montée du racisme. Il présente également son point de vue sur l’ethnicisation et suggère des pistes pour l’enrayer.
Les identités nationales se sont toujours construites contre un ennemi, réel ou imaginaire. Aujourd'hui, l'islam a remplacé le communisme dans la fabrication d'une identité occidentale.
Le sentiment d'inégalité et d'injustice sociale dans la petite classe moyenne
Dans cet entretien en 2012, le sociologue, Michel Forsé nous présente le regard qu’il porte sur l’actuel sentiment d’inégalité et évoque le sentiment d’injustice partagé par les personnes de la petite classe moyenne qui se sentent abandonnées. Il souligne également le développement des stratégies d’évitement entre les différentes classes sociales et apporte un éclairage sur la nouvelle territorialisation des inégalités.
Dans cette nouvelle géographie des inégalités, le sentiment d'injustice est probablement le plus fort dans les classes populaires qui ont été reléguées vers le périurbain. Elles ont le sentiment d'être abandonnées.
L'intégration est-elle en panne ?
Dans ce texte de 2015, Patrick Simon, sociologue et démographe, dresse un tableau optimiste alors que certains chercheurs diagnostiquent une racialisation de la société française, une re-traditionnalisation des mœurs ou un effet de ciseau entre une sécularisation qui s'accélère chez les français de culture catholique, mais régresse chez ceux de culture musulmane.
L’action communautaire, outil pour refonder l’intervention sociale de proximité
Dans cette interview de 2018, la sociologue Claire Autant-Dorier explique comment les dynamiques collectives de l’empowerment et les diverses formes d’activation citoyenne peuvent sous-tendre un autre dialogue avec les communautés ethniques et plus largement avec les bénéficiaires de l’action sociale. C’est en créant des projets autour de sujets d’intérêts communs que l’on peut créer de réelles opportunités sociales.
Pour les travailleurs sociaux, ce n’est pas du tout évident parce qu’ils ont d’abord une grille de lecture en termes d’inégalités qui a tendance à occulter la question ethnique taboue en France.
Les enjeux de la reconnaissance du hip-hop par les institutions culturelles : le cas de l’agglomération lyonnaise
Dans ce texte, écrit pour les cahiers Millénaire3 et publié en 2000 dans le supplément au Cahier n°19, le politologue et sociologue, Cédric Polère, retrace les enjeux de cette reconnaissance.
Les institutions culturelles de l'agglomération lyonnaise ont fait un pas important dans la reconnaissance du hip-hop comme en témoigne la place qui lui est réservée dans la programmation de la Maison de la Danse. Encore faut-il reconnaître toutes les spécificités culturelles existantes non pas seulement en tant qu'art mais aussi en tant que fonction sociale et comme élément de la diversité culturelle.
Marche pour l'égalité
La dynamique associative aux Minguettes depuis la Marche pour l’égalité
Interview en 2008, de Yaya Camara, Militant de la marche pour l’égalité (les Minguettes 1983) et étudiant à l’Institut des Sciences Sociales Appliquées (ISSA) de l’Université Catholique de Lyon.
La France, c'est comme une mobylette, il faut du mélange pour la faire avancer
Un témoignage sur l’été chaud des Minguettes de 1981 et la Marche pour l’égalité de 1983
Interview en 2008 de Fawzia Meknach.
À travers ces mobilisations, enfin, nous avions le droit à la parole, la possibilité d’occuper l’espace médiatique, l’impression d’être vus, d’être nous-mêmes et de pouvoir prendre notre destin en main.
Politiques publiques
Les grands quartiers d’habitat social à Lyon : l’action des élus communautaires
Dans cette interview de 2008, nous revenons avec Bruno Voisin, sociologue et urbaniste, sur l’évolution de la perception et de l’action des élus communautaires en faveur des grands quartiers d’habitat social, et notamment des Minguettes.
En 1980, Francisque Collomb rend visite à Marcel Houël. Cette visite est forte et symbolique : c’est la première fois qu’un Maire de Lyon se rend à Vénissieux !
La mise en place des dispositifs de politique de la ville en lien avec le Grand Lyon
Dans cette interview en 2008, André Gerin, maire de Vénissieux, relate le contexte des Minguettes à la fin des années 70 et au début des années 1980, la marche de l’égalité organisée grâce à une mobilisation forte d’acteurs locaux associatifs ou habitants, la mise en place des dispositifs de politique de la ville en lien avec le Grand Lyon et sur sa vision d’avenir de ces quartiers et plus globalement de notre agglomération.
L'agglomération s'est construite sur une politique ségrégative
La politique de la ville dans les années 1990 : une politique de discrimination positive pour des quartiers et des populations exclus de la ville et de la vie sociale et économique
Cette étude, en 2009, de Catherine Panassier, sociologue, aborde cette période des années 1990 et raconte une histoire du Grand Lyon, la perception des grands quartiers d’habitats sociaux et l’évolution de la Politique de la Ville qui leur a été dédiée. Elle aborde plus précisément l’exceptionnelle aventure de la danse urbaine qui a conduit les jeunes des quartiers au cœur de la ville et créé ainsi une passerelle entre le dedans et le dehors.
Enquêtes d'opinion
Aspirations et clivages de la société : trajectoires sociales
25 fiches compilent sur ce thème des enquêtes réalisées au niveau national et international. Comment trouver sa place dans la société ? Avec quels supports (éducation, emploi, systèmes de protection et de solidarité…) ?
Les enquêtes qui portent sur l’éducation, l’emploi, la redistribution, les solidarités ne laissent guère de doute. On assiste à des bascules. Des divergences de vues et des clivages ressortent sous l’angle de l’âge, de la catégorie socioprofessionnelle, de l’appartenance politique et du genre. On perçoit aussi des aspirations qui sont rarement unanimement partagées.
Minorités et identités sociales, confiance dans les institutions
En 15 fiches, Sebastian Roché, politologue, traite de la relation de la population minoritaire jeune mais aussi adulte à la société en fonction des identités sociales (l’appartenance ethnique, la religion, la discrimination), d’une part, et également à la confiance dans les institutions (école, police) et leur rejet par la violence terroriste. Son étude, réalisée en 2018, compilent pour cela des enquêtes réalisées au niveau national et international.
Religion
Le communautarisme religieux
Pour les uns, le communautarisme est une réalité (selon les cas qualifiée de tellement minoritaire qu’elle n’est pas inquiétante, ou de phénomène préoccupant qui s’étend, notamment chez les personnes de confession musulmane). D’autres chercheurs dénoncent un fantasme, un mot épouvantail qui traduirait seulement le racisme, l’islamophobie, le nationalisme, ou la vision assimilationniste de la nation de ceux (issus du groupe dominant) qui l’utilisent. Dans ce débat, l’inversion systématique des arguments et des liens de causalité est stupéfiante (qu’est-ce qui provoque le repli ? Qui fait pression pour imposer ses normes ? Qui est communautariste ? …). En arrière-plan, c’est le modèle républicain qui se redessine.
Dans cette étude (2017), Cédric Polère, sociologue, décrypte le concept de communautarisme et met en évidence plusieurs tendances ou débats qui se jouent à son sujet.
Communautarisme : une chimère du nationalisme français ?
Fabrice Dhume, enseignant-chercheur à l'Université Paris Diderot, a publié en 2016 le livre Communautarisme. Enquête sur une chimère du nationalisme français (édition Demopolis). Spécialiste des questions d’intégration, de racisme et de discrimination, il répond à nos questions en 2016, et nous aide à comprendre ce que signifie le mot de communautarisme et ce qu’il colporte quand on l’utilise.
le discours du communautarisme est une prophétie auto-créatrice : à force d'accuser les gens d'être dans un "repli communautaire" et de ne pas vouloir s'intégrer, on tend à les pousser à se reconnaître puis à revendiquer des "communautés" comme seule manière de se faire entendre.
La France face aux communautarismes
Dans cette interview de 2016, S.Romi Mukherjee, docteur en histoire des religions à l'université de Chicago répond à nos questions et revient sur ce qui pourrait relever de formes de communautarisme dans la société française.
Le culturalisme a remplacé le discours sur les classes sociales, l'égalité est en train d'être remplacée par la reconnaissance de l'identité. Or, la reconnaissance d'une identité ne crée pas forcément de l'égalité structurelle.
Communautés et communautarisme
Dans cette interview de 2016, Christine Rodier, sociologue, revient sur l'utilisation des normes musulmanes en tant que vecteur d'émancipation ou éléments de pression.
La difficulté à faire la distinction entre communauté et communautarisme est liée au refus, en France, de prendre en compte la dimension religieuse. Les dimensions politiques, idéologiques et religieuses sont très souvent sous-estimées par les chercheurs.
Les difficultés d’ouvrir une école confessionnelle
Interview en 2018 de Nazir Hakim, fondateur du groupe scolaire Al Kindi de Décines et Yassine Benzada, directeur de l’établissement depuis 2013.
Nazir Hakim revient sur la genèse et les ambitions du projet : être une école ouverte à tous reconnue pour son excellence scolaire et permettre aux élèves musulmans qui le souhaitent de pratiquer leur culte.
Yassine Benzada nous explique sa politique d’ouverture de l’établissement aux élèves en difficulté, la manière dont les valeurs humanistes portées par l’Islam rencontrent celles de l’idéal républicain et sont essentielles à la formation de citoyens épanouis et intégrés.
Notre but est de construire des citoyens fiers de ce qu’ils sont et font, qui soient à l’aise avec autrui et en capacité de mettre autrui à l’aise. C’est l’utopie, c’est Platon.