Quartiers durables : une approche citoyenne
Étude
Interview de Cécile Sacco
Au carrefour de l’ensemble des politiques publiques, la maîtrise d’ouvrage déborde largement de la seule ingénierie.
Il s’agit également de dialoguer avec les publics perturbés par les travaux, entendre ces paroles pour les intégrer au mieux, tout en expliquant la portée globale de chaque projet.
Dans cet entretien, Cécile Sacco, directrice adjointe de la Direction de la Maîtrise d’Ouvrage Urbaine (DMOU) de la Métropole de Lyon, nous présente les priorités de son métier, entre efficacité opérationnelle et pédagogie citoyenne.
Pour commencer, pouvez-vous nous présenter vos missions au sein de la Métropole de Lyon ?
Je suis directrice adjointe auprès de Fanny Laperrière à la Direction de la Maîtrise d’Ouvrage Urbaine (DMOU) et au sein de la délégation Urbanisme et Mobilités (DUM). Notre direction assure le pilotage d’opérations d’espaces publics et d’aménagement, des études de faisabilité jusqu’à la livraison, en régie ou confiées à des aménageurs. Notre direction regroupe une centaine de collaborateurs, qui contribuent dans la diversité de nos métiers, une quinzaine dans la direction, à la mise en œuvre d’environ 300 projets qui couvrent l’ensemble du territoire de la Métropole, de nature et de tailles variées. La DMOU abrite aussi la direction de projet des Voies Lyonnaises dont l’échelle opérationnelle est probablement inédite.
C’est donc une direction dont le rôle est important dans le champ de la maîtrise d’ouvrage opérationnelle, par le nombre de projets de la Programmation pluriannuelle des investissements (PPI) 2021- 2026 qu’elle suit, mais aussi parce que nous sommes intégrateurs de nombreuses politiques publiques métropolitaines que nous déclinons dans les projets qui nous sont confiés. Il y a ainsi un enjeu majeur pour nous d’étayer les collaborations au sein de notre collectivité et avec l’ensemble de nos partenaires.
Nous portons aussi des projets transversaux comme la charte des espaces publics, l’urbanisme transitoire ou encore l’animation des plateformes du BTP, dans une optique de faire culture commune de manière très large, mais aussi d’innover, dans nos pratiques, méthodes et réalisations, en réponse aux grands défis de l’aménagement urbain sur la Métropole.
Concrètement, à travers ce que pourrait voir un habitant de la Métropole, est-ce que vous pourriez nous décrire le type de chantier sur lequel vous travaillez ?
De manière assez schématique, on peut dire que nos chantiers se déroulent soit sur le domaine public, quand nous requalifions des rues, créons des aménagements cyclables, aménageons des places, soit sur des assiettes foncières, le plus souvent en renouvellement urbain, sur lesquelles nous développons des opérations d’aménagement créant logements, bureaux, espaces publics, nouveaux équipements publics… Ces opérations de nature variée, sont d’ailleurs plus ou moins impactantes en phase chantier, selon leur emprise et la gêne qu’elles occasionnent sur le domaine public.
Quand on entend cette expression de « chantier perturbant », quel type de perturbation est évoqué ? Et pour qui ?
Les perturbations peuvent être de différente nature : liées au bruit, à la poussière, mais aussi à l’ensemble des obstacles et des contournements qui vont être nécessaires par rapport à une emprise de chantier, aux contraintes de circulation, pour les piétons, les cycles et les voitures ; un chantier perturbant, c’est aussi une appréciation liée à l’aspect visuel et à l’encombrement de l’espace qui peut résulter des travaux. Cela peut aussi être la question de l’installation des bases vie des entreprises, surtout quand on est dans des secteurs relativement denses : on empêche alors possiblement la bonne visibilité d’un commerce et on peut être amenés à déplacer une base de vie pour minimiser la gêne occasionnée.
La situation d’un chantier évolue chaque jour, et la qualité de la gestion du site doit être suivie au quotidien par le chef de projet, le technicien qui l’accompagne, le maître d’œuvre et par les entreprises aussi qui sont souvent la première porte d’entrée d’une doléance ou d’une demande d’explication d’usagers ou de riverains.
Peut-on fixer objectivement des indicateurs de degré de perturbation, ou est-ce beaucoup plus de l’ordre du dialogue et proportionnel aux réactions ?
Je commencerais par dire qu’il y a un certain nombre d’obligations réglementaires en matière de gestion de chantier, mais aussi des guides de préconisations pour des chantiers à faibles nuisances, à l’attention des maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre et entreprises. Les attendus qui découlent de ce cadre d’intervention pour les entreprises sont qualifiables, quantifiables.
L’observation du chantier doit par ailleurs permettre de vérifier que le fonctionnement du secteur est préservé au mieux au quotidien : maintien des cheminements piétons, accessibilité des cycles, accessibilité aux commerces, accessibilité PMR, maintien du fonctionnement logistique, collecte des ordures ménagères, c’est ce que l’on doit a minima aux usagers.
Mais en effet, le degré de perturbation va aussi être lié à une approche sensible du chantier, au climat ambiant et à la façon dont certains sujets vont monter en tension. Cela peut venir des commerçants, des riverains, sur un secteur où le projet n’arrive pas forcément avec une adhésion forte de tout le monde au départ et génère des inquiétudes. Le chantier va alors devenir un espace de contestations.
Nous avons aussi un certain nombre de grands acteurs tels que les services de secours et les hôpitaux, avec lesquels nous dialoguons dans cette période de forte intensification et de cumul de chantiers. Des espaces d’échanges se sont instaurés avec eux, à l’aune des projets que l’on engage dans ce mandat, mais aussi dans le cadre d’un groupe de travail que nous co-pilotons avec la Délégation Gestion et Exploitation de l’Espace Public (DGEEP), mis en place depuis une année avec les sapeurs-pompiers de la métropole de Lyon et du Rhône (SDMIS), avec comme enjeu premier de préserver les conditions d’accessibilité des services de secours.
Quelles sont les modalités de concertation ou d’échange mises en œuvre ?
Le dialogue est installé sur toutes les opérations, dès la phase d’étude, et il se poursuit jusqu’à la fin des travaux, Des réunions publiques peuvent être activées au démarrage d’un chantier pour expliciter son phasage, lorsque l’ordonnancement du chantier va être compliqué et que les contraintes du site sont importantes.
On peut aussi organiser des visites de suivi de chantiers et faire du « porte à porte ». Nous avons un dispositif de médiation de chantier qui existe sur les Voies Lyonnaises et sur les chantiers tramway de Sytral Mobilités et nous voyons bien qu’il serait pertinent sur beaucoup d’autres opérations, là où il y a une forte intensité d’usages commerciaux en particulier. C’est un rapport d’hyper proximité avec les riverains qui est très utile et nous permet de « prendre le pouls », de gérer au jour le jour les points de tension.
Ce rapport de proximité peut aussi passer par un dialogue direct des élus avec les riverains, en amont du démarrage d’un chantier ou pendant celui-ci. Les échanges peuvent être vifs dans ce cadre, mais aussi souvent apaisent les tensions.
Nous avons aussi bien évidemment des supports in situ comme des totems, des panneaux d’information, etc. Ils ne sont pas toujours faciles à positionner d’ailleurs. On doit aussi penser au jalonnement quand on est sur un projet qui perturbe la circulation. Il y a également bien sûr les réseaux sociaux sur lesquels la Métropole est présente, et nous testons un système de boucles d’informations WhatsApp, sur certains projets.
Les flyers restent enfin un support que nous activons pour être le plus réactifs possible dans l’information en phase chantier, mais nous avons surtout besoin de relais de proximité de ces informations : de la part des communes, mairies d’arrondissement de Lyon, mais aussi plus largement de la part des acteurs locaux.
La dernière chose qui est totalement indispensable est que cette communication de chantier soit soutenue par une communication sur le projet à terme et les « gains » qu’il va amener, pour que les gens, au-delà des nuisances du chantier, arrivent à se projeter et à sortir des désagréments du quotidien. Il s’agit de donner à voir vers où l’on va, c’est un enjeu important, porté par nos élus et déployé par la direction de la communication.
Qu’est-ce qui détermine le degré d’engagement de la collectivité dans ce dialogue, tout le long de la vie du projet ?
On peut être dans le cadre d’un projet avec plus ou moins de contraintes fonctionnelles et donc plus ou moins de marges de manœuvre pour travailler avec les habitants et usagers et on se doit d’énoncer clairement ce qui va être négociable ou non. Au-delà de cela, il y a la question de la volonté politique d’aller sur un dispositif de concertation plus ou moins ambitieux et aussi plus ou moins long.
La question de la gestion du temps nous tiraille en permanence. La concertation nécessite du temps. Pour les projets d’espace public en particulier, nous sommes le plus souvent attendus par nos élus pour une livraison des opérations avant la fin du mandat. Dans ce cas, nous sommes parfois amenés à leur dire : « Soit on tient ce planning et on livre dans le mandat, mais on ne pourra pas avoir un espace de dialogue et de concertation très étayé, soit on choisit de proposer aux usagers un large espace de dialogue visant à co-construire le projet le plus possible et l’opération ne sera pas livrée dans le mandat ! » Pas toujours facile de trancher…
Le degré d’engagement de la collectivité dans le dialogue public est aussi lié à la relation à la commune. C’est compliqué de conduire une concertation s’il n’y a pas une adhésion, un appui et un accompagnement, voire un co-portage de la part de la commune sur laquelle se réalise une opération.
Dans un monde idéal où le planning n’entrerait pas en jeu, comment définir les bénéfices que peuvent apporter ces échanges avec les usagers ?
Ce qui est le plus important pour nous, c’est l’expertise d’usage des gens qui vivent et travaillent sur un territoire donné, pour bien appréhender ses enjeux de fonctionnement ; ce sont les besoins du territoire que l’on va chercher dans le dialogue avec les usagers.
Quand on parle de « chantier perturbant », selon vous, qu’est-ce qui dérange le plus les usagers
Ce qui rend un chantier perturbant pour les usagers, de mon point de vue, ce sont à la fois les transformations physiques immédiates de l’environnement et la gêne occasionnée, mais aussi les changements d’usage qui sont à l’œuvre.
Au quotidien, je pense que la chose la plus exigeante pour nous en vigilance et réactivité est non seulement de garantir en tous points et tout moment la sécurité du chantier, mais aussi de maintenir le fonctionnement de la ville, c’est-à-dire « Je peux rentrer chez moi et aller dans mon parking », « Je peux arriver jusqu’à mon commerce et ne pas marcher dans la boue quand il pleut », « Je peux continuer d’y aller à vélo quand j’en ai envie », « Les camions poubelles peuvent toujours faire leur circuit »… Le fonctionnement quotidien de la ville est un irritant sur lequel nous devons être très présents.
Pour un habitant, un usager, il faut à la fois vivre ce quotidien, mais aussi le processus de transformation qui s’engage à travers le chantier : la transformation de mon environnement, mais aussi de mes pratiques qui changent déjà : parce qu’une rue qui va être fermée à la circulation en phase chantier restera peut-être fermée post-chantier.
Dans le cadre d’une opération d’aménagement en phase chantier, on voit vraiment l’évolution d’un quartier en devenir durant de longues années. Quand on voit arriver un nouveau programme de logements, ou une nouvelle voirie devant son immeuble, cela peut être compliqué. On a le droit de se dire que ce n’est pas facile : vivre le quotidien du chantier, et en même temps cette transformation urbaine massive, avec tout ce que cela engage de l’histoire et de l’identité d’un quartier.
Qu’est-ce qui peut surprendre du point de vue opérationnel dans l’attachement qu’expriment les habitants vis-à-vis de leur quartier, tel qu’ils le connaissent ? On parle surtout d’ergonomie de l’espace public, ou est-ce que la part sensible et affective pèse lourd dans ces questions ?
Nous ne sommes pas surpris, je pense, de l’attachement qu’expriment les habitants à leur quartier. Nous avons une posture de maître d’ouvrage qui doit être forcément humble par rapport à un territoire donné. Nous avons des politiques publiques à mettre en œuvre, une idée de la façon dont ce territoire va être amené à évoluer pour aller vers plus de confort d’usage ; pour autant, tout ce qui relève de l’attachement aux lieux et à leur histoire n’est pas entre nos mains, ce sont les usagers qui en sont détenteurs. C’est pour cela que le dialogue s’instaure le plus en amont possible.
Aujourd’hui, on développe beaucoup de diagnostics d’usages très en amont, avec l’appui de la direction de la Prospective et du Dialogue public (DPDP) notamment. On ne questionne alors pas tant les habitants sur le programme opérationnel que sur les grands enjeux d’évolution de leur quartier, les usages qu’ils voudraient en faire demain, leur vision de son devenir. C’est une approche très enrichissante.
L’urbanisme transitoire, démarche que nous développons, est aussi une façon de dire aux gens : « Donnez-nous à voir si cet espace pourra être un espace de jeu demain, ou si ce sera un espace de transit où les gens ne se poseront pas ! » L’urbanisme transitoire nous a fait évoluer dans nos démarches de construction des projets urbains.
On se fait parfois une idée en se disant par exemple : « Ce manège fonctionne très bien place Grandclément, donc il devrait très bien fonctionner sur un autre territoire à Villeurbanne », mais il peut ne pas fonctionner du tout. Il y a des mésusages qui peuvent s’installer. À ce moment-là, cela veut dire qu’il faut redialoguer avec la commune, les habitants du secteur sur les besoins de ce quartier. Aujourd’hui, dans nos pratiques, je pense que l’histoire des lieux et l’expertise des usagers sont intégrées. La vraie contrainte qu’on a, encore une fois, est celle du temps. Cela peut être parfois frustrant pour nous aussi.
Si le dialogue en amont n’a pas permis d’anticiper tous les problèmes, est-il est encore possible pour les usagers de s’adresser à vous ?
Bien sûr, ils peuvent s’adresser à nous sur la gestion de chantier en tant que telle pour porter des réclamations ou nous faire des suggestions. On se doit d’être réactifs et d’ajuster sur l’aspect gestion de chantier. Après, si la question est : « Est-ce qu’on peut modifier le projet, y compris en phase chantier, à l’aune de demandes qui émergeraient ? », je répondrai que l’on peut faire des adaptations à la marge, mais nous préférons laisser une chance au projet, et évaluer le fonctionnement de cet espace public une fois livré. La phase chantier n’est absolument pas propice à cela. Il faut du temps d’appropriation d’un nouvel espace une fois livré, et oui, une fois que les usages s’installent, il peut s’avérer nécessaire de revenir sur certains aménagements, ou le plus souvent de les compléter, les améliorer.
Quels sont les « bons côtés » des grands chantiers suffisamment importants pour perturber la vie d’un quartier ?
En premier lieu, qu’ils engagent la transformation. Prenons l’exemple d’une rue qui sera piétonne après chantier et qui est fermée à la circulation des véhicules pendant les travaux ; il y a d’ores et déjà alors une transformation qui s’opère. Les gens se permettent de marcher sur la chaussée, la présence des piétons est beaucoup plus visible, le secteur est beaucoup plus apaisé. Et la transformation est engagée.
Le chantier peut aussi inviter au changement de pratiques, par la contrainte qui pousse certes, à abandonner la voiture et à adopter un autre mode de transport, que l’on utilisera ensuite, peut-être, durablement. Les chantiers sont aussi une opportunité d’espace de dialogue de manière générale avec les riverains, mais aussi avec les écoles, pour expliquer auprès des scolaires nos métiers d’aménagement, les sensibiliser à la place du végétal dans la ville, au respect des espaces publics qui sont un bien commun.
Les chantiers sont un point d’appui pour parler de la transformation de la ville. Il y a des actions qui se mettent en place, y compris pour parler de ce qui se passe sous l’espace public, de la « vie des sous-sols », parce que la présence des réseaux urbains est un vrai sujet et que les travaux des concessionnaires occasionnent une gêne importante, sans que le pourquoi de ces travaux ne soit forcément compris. Comment communiquer sur la vie des sous-sols ? Comme diraient mes collègues de la communication, ce sont les « coulisses de la ville » et c’est donc tout à fait important d’en parler.
Le chantier peut aussi devenir un espace d’expression et d’appropriation d’un lieu donné pour un temps donné par un certain nombre d’usagers, à travers l’urbanisme transitoire que nous évoquions. J’ai en tête l’exemple d’une forme de résidence citoyenne, qui s’est installée sur la place Chardonnet livrée l’année passée. Comme le chantier durait plus longtemps que prévu, avec des périodes d’arrêt des entreprises dues à des aléas techniques, on a pu proposer aux habitants d’être force de proposition pour l’utilisation de cet espace qui allait devenir à vocation piétonne et intégrer en partie au projet les pratiques nées à cette occasion.
L’urbanisme transitoire s’est diffusé dans nos pratiques de la fabrique de la ville et c’est un outil majeur de redynamisation locale. Mais c’est pour nous aussi un projet dans le projet en matière de pilotage. Une initiative citoyenne, une occupation associative d’un lieu pour un temps donné, cela s’accompagne. On a des équipes qui sont motivées et mobilisées pour aller sur ces sujets, mais cela ne se fait pas tout seul. Il faut mobiliser nos expertises et nos collègues des autres directions pour accompagner ces projets. Je pense en particulier au rôle de la Direction Patrimoine et Maintenance (DPM) sur le patrimoine bâti, et des subdivisions de voirie et nettoiement.
La fonction de cet urbanisme transitoire semble dépasser petit à petit la simple compensation du chantier, pour répondre à un besoin permanent et pérenne de fluidité, d’agilité dans la distribution des équipements. Au rythme où cela se mène, cela commence à faire partie du métabolisme culturel et social de la ville, non ?
On est d’accord. Il fut un temps où on se disait : « Le temps de cette opération va être long. Il faut occuper le terrain. Il faut que les gens s’y retrouvent dans cette période » et on activait un projet transitoire. Aujourd’hui, on a cette expression de besoins qui vont bien au-delà ; l’urbanisme transitoire répond à des besoins d’hébergement d’urgence, à des besoins économiques, mais aussi à des besoins liés à la vie culturelle ou sportive des lieux. Et l’urbanisme transitoire pose également la question du « Qui fait la ville ? ». La réponse ne vient pas que des experts, ce sont aussi les usagers, ses occupants.
Sur l’urbanisme transitoire, jusqu’à maintenant, nous avons travaillé à l’aune de toutes les envies et de toutes les possibilités d’aller capter les initiatives que pouvaient avoir les acteurs d’un territoire et essayer d’accompagner ces dynamiques. Aujourd’hui, on a une vingtaine de projets d’urbanisme transitoire pilotés par la DMOU, presque 40 sites sur le territoire de la Métropole, un vivier d’acteurs très important et des bénéfices évidents de ce mode d’intervention.
C’est une approche qui est très enrichissante, mais qui oblige à de l’ingénierie de projet et à de l’évaluation parce qu’il y a de l’investissement public. Il y a une période de foisonnement, d’émergence et on arrive dans une période où on va devoir organiser un peu plus cet urbanisme transitoire à l’échelle de la Métropole. Aujourd’hui, il faut prioriser certaines politiques publiques ou certains sites, parce que les moyens ne sont pas suffisants pour continuer à fonctionner à l’opportunité.
Pour une plus grande sobriété en matière de consommation d’eau et d’électricité, il y a un certain nombre de travaux d’entretien ou de rénovation, la végétalisation qui demande de trouver de la place sous terre pour les racines, le développement des transports en commun avec le métro, etc. Est-ce que la transition écologique passe forcément par un grand réaménagement de la ville et par des perspectives de travaux particulièrement importants dans les prochaines années ?
Pour que les gens trouvent une ville agréable à parcourir, agréable pour se poser à proximité de chez eux, il faut que l’on réintervienne sur l’espace public parce qu’il y a un enjeu sur deux registres.
En premier, développer les alternatives de mobilité, la marche et le vélo. C’est à l’œuvre, mais cet effort doit se poursuivre, on n’est pas au bout du chemin sur ces sujets. Cela oblige à partager l’espace public, c’est incontournable. Il y a aussi la question du confort d’usage et du confort climatique, avec la place du végétal, la possibilité que les espaces publics ne soient pas que des espaces traversés, mais aussi des espaces de pause.
Au pied de chez moi, je dois pouvoir trouver un petit espace confortable où je peux me ressourcer. C’est l’enjeu qu’on a déjà aujourd’hui et qu’on aura demain. Il se traduira possiblement par des interventions relativement légères sur de petits espaces où on verra une opportunité de travailler sur des plantations, ou de développer une autre forme d’ombrage parce qu’on ne pourra rien y planter, à partir de dispositifs d’ombrage, même s’il n’y a rien de mieux que le végétal bien sûr.
En parallèle, il y a aussi un enjeu de développer des parcours piétons de plus grande échelle sur le territoire de la Métropole et les réflexions sont déjà engagées. On va donc probablement être à la fois sur des projets relativement structurants, de grande ampleur, et sur des projets d’hyper proximité, avec des approches qui devront être relativement agiles pour combiner ces deux types de démarche de projet.
Au niveau de vos métiers, dans quelle mesure ce recours croissant au dialogue et à l’échange avec les habitants a modifié les compétences à mobiliser ? Est-ce qu’on peut dire qu’aujourd’hui, le métier se réinvente, notamment à l’aune de la transition écologique et de l’acceptabilité qu’elle exige ?
Le dialogue et l’échange avec les usagers font partie de nos métiers. Nous avons des savoir-faire, ils sont intégrés dans nos pratiques avec l’appui des directions métiers, la DPDP et la direction de la communication. Mais nous avons une marche à gravir. Aujourd’hui, on travaille, en maîtrise d’ouvrage urbaine, le plus souvent sur un espace public donné, sur un périmètre d’opération d’aménagement donné. En même temps, il y a ce changement d’échelle, cette obligation de transformer l’espace public de manière massive, mais aussi nos façons d’habiter en ville, pour s’adapter au changement climatique et que la ville reste tout simplement vivable.
Finalement, j’ai le sentiment que nous sommes parfois un peu étriqués dans le dialogue avec les habitants. Nous avons envie de leur dire : « Ce qui se passe sur votre territoire, dans votre rue, c’est une partie d’une plus grande transformation nécessaire et incontournable ». Il s’agit de mettre en perspective le dialogue qu’on a à l’instant T sur un projet avec ces transformations de grande échelle, ces politiques publiques, afin que les riverains, les habitants, les usagers en soient vraiment parties prenantes… Il faut y aller parce qu’on n’a pas le choix !
C’est l’expérience de ce type de dialogue qui permettra d’ouvrir de nouvelles perspectives ?
Oui. Aujourd’hui, la jonction n’est pas encore faite entre la façon qu’on a de dialoguer avec les habitants sur un projet et la façon qu’on a de dialoguer à grande échelle sur les politiques publiques, je pense par exemple à la révision du PCAET. Cette passerelle est encore à construire, y compris pour expliquer le sens global de l’intervention que l’on a le sentiment de subir au pied de chez soi au moment d’un chantier. Cela doit aussi permettre de donner un peu plus de sens et amener de l’adhésion aux projets.
Chaque chantier s’inscrit dans une transformation métropolitaine d’ampleur. Il est nécessaire que les gens perçoivent un peu plus la portée générale de notre action, comme une réponse aux enjeux notamment de confort climatique et d’adaptation de notre manière de vivre en ville.
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