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Retour d'expérience

Interview de Dorothée PIQUET

Responsable de l'unité Ressources juridiques et domanialité à la direction de la voirie

<< Les responsabilités en cas d'expérimentation sur la voie publique : le cas du Grand Lyon >>.

Texte écrit pour la revue M3 n°8

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Date : 30/11/2014

Texté écrit pour la revue M3 n°8

En 2013, le Grand Lyon a cherché à permettre l’expérimentation en situation réelle sur la voie publique d’un véhicule automobile entièrement autonome. Il s’agissait de tester, le temps d’un week-end, un mini service de transport en commun de 8 personnes. Pour de multiples raisons, très utiles à analyser, l’essai grand public n’a pas eu lieu. Retour d’expérience.

 

Quelle était votre priorité, en tant que gestionnaire de la voirie ?
La première préoccupation est de veiller à la sécurité des personnes, dans le véhicule mais aussi dans le domaine public. Comme il s’agissait d’un véhicule expérimental, l’espace de circulation de la navette devait lui être réservé de façon exclusive, cette restriction devait être entérinée par arrêté du maire, détenteur des pouvoirs de police.

Le bureau de contrôle sollicité préconisait un grand nombre de dispositions : la zone d’évolution du véhicule ne devait pas être ouverte au public et un barriérage devait être mis en place. Il fallait aussi canaliser le public sur les zones d’embarquement et de débarquement, restreindre l’accès aux personnes valides, interdire les poussettes et vélos…

Concernant le véhicule, un technicien devait être posté à proximité de la commande d’arrêt d’urgence.

 

Comment les responsabilités étaient-elles partagées ?
Du fait de l'absence de chauffeur, il ne pouvait y avoir de faute personnelle, et la responsabilité d'un éventuel accident aurait directement été portée par/reposé sur l’auteur du dispositif — en l’occurrence le Grand Lyon — et sur le maire, garant de la sécurité des usagers.

En cas d’incident ou d’accident, la responsabilité pénale du président de la Communauté urbaine, du maire de Lyon et même des agents pouvait être recherchée. L’article L.2123-34 du Code général des collectivités territoriales offre un statut particulier aux élus, puisque la faute non intentionnelle ne peut caractériser le délit. Néanmoins, si le risque est manifeste, un élu doit pouvoir faire état d’accomplissement des « diligences normales, compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait ». La responsabilité civile de la collectivité pouvait également être recherchée, avec un risque, en cas d’accident, d’avoir à verser des indemnités. Tout cela explique les précautions demandées qui allaient presque à l’encontre du concept.

 

Ne revient-il pas à l’État d’établir les conditions d’homologation et d’utilisation des véhicules dans l’espace public ?
Oui, mais il n’existe qu’un cadre pour les transports autonomes guidés, comme la ligne D du métro de Lyon, ou pour les véhicules guidés avec chauffeurs, comme les bus de Rouen guidés par caméra. Dans notre cas, les services préfectoraux ne pouvaient pas répondre. La solution était de prendre un arrêté de déclassement provisoire du domaine public, pour en faire un espace « privé ». Dès lors, les élus locaux étaient responsables de tout à 100 %. Nous nous étions rapprochés du ministère pour que l’expérimentation lyonnaise contribue d’ailleurs aux tests d’homologation.