Michel Desmurget : « C’est l’ensemble de notre humanité qui est impacté par les écrans »
Interview de Michel Desmurget
directeur de recherches en neurosciences à l'INSERM, à l'Institut des Sciences Cognitives Marc Jeannerod
Dossier
La conception de l’éducation et de l’école sont des sujets de débat, plus largement de société, ayant fait l’objet de multiples travaux de recherches notamment consignés dans le débat national sur l’éducation. Il montre qu’à travers les époques l’enseignement se nourrit à la fois des connaissances acquises et transmises mais aussi des expériences des élèves. Il ouvre la voie à de multiples interrogations comprenant l’obligation scolaire, l’efficacité de la prise en charge des élèves, la répartition de l’école sur le territoire, la connaissance et l’allocation de la dépense inhérente et la clarté de la répartition des compétences entre Etat et communes (voire intercommunalité). La question de l’éducation a dans le Grand Lyon fait l’objet dès 2004 d’un cycle de conférences autour de la thématique Apprendre et Eduquer faisant ressortir l’évolution des valeurs de la société française et les défis qui s’imposent à nous : l’humanisation de l’humain, les savoirs nécessaires à l’éducation du futur, l’apprentissage tout au long de la vie et les enjeux de la parentalité.
A côté d’autres communautés éducatives (famille, institution du temps libre, organisation religieuse, école, centre social…), les collectivités locales ont joué un rôle croissant notamment dans la construction et la gestion des équipements scolaires contribuant à favoriser la mixité, la gratuité, la massification voire la démocratisation de l’éducation montrant le lien contigu entre école et environnement social urbain. L’école, cet « ensemble d’apprentissage collectif », servirait donc au 21ème siècle tout à la fois à éduquer, instruire, intégrer et promouvoir. Entre théories et pratiques, entre visions républicaines et démocrates, entre générations et réalités professionnelles, l’école publique ou privée sert aussi sa propre évolution, elle qui, en moyenne, façonne ou individualise le cerveau de ses élèves pendant au moins le quart de leur vie. La question « Que doit transmettre l’école et comment ? » apparaît donc aujourd’hui très fortement liée à celle du vivre ensemble et de la place de l’agglomération à construire et favoriser l’égalité des chances face à l’accès de la connaissance et aux nouveaux moyens de communication. La loi réaffirme que l’éducation est un service public national relayé en local par des politiques éducatives locales, sous entendu que l’école reste le tremplin pour la transmission des savoirs et la collectivité, le réservoir des initiatives complémentaires pour garantir l’intégration de ses membres.
Égalité des chances/ réussite pour tous, qu’est-ce que cela implique ?
Le système éducatif français fait aujourd’hui l’objet d’un débat portant notamment sur le rôle que doit ou devrait jouer l’école, sa place dans la société, les savoirs et les contenus à transmettre aux élèves et les méthodes pour assurer cette transmission. Ce débat très médiatisé donne souvent lieu à des descriptions caricaturales des deux principaux courants de pensée qui s’expriment à ce sujet, et que l’on nomme traditionnellement le courant républicain et le courant démocratique.
L’école républicaine enseigne les humanités
L’homme est foncièrement mauvais et « barbare », seule l’éducation peut lui permettre de dépasser cet état de nature et d’acquérir la liberté. Le rôle de l’Ecole est donc de permettre l’émancipation intellectuelle nécessaire à la construction d’un sujet libre. Ainsi, s’inscrivant dans le droit fil de la philosophie des Lumières, ce principe met en avant le fait que toute société dispose d’un ensemble de valeurs communément partagé par tous et sur lequel repose l’intégration. En affichant l’universalité de son message, l’Ecole se donne pour objectif de dépasser les clivages sociaux ou régionaux, seule garantie de la consolidation de l’Etat national.
L’institution scolaire républicaine est donc conçue pour construire le futur homme en lui donnant une culture universelle, à travers l’instruction des savoirs et des savoir-faire. L’Ecole doit donc enseigner les humanités, ainsi définies : « recueillir dans l’art, la science, les langues enseignées par approche des civilisations qui se disent en elles, la philosophie, le meilleur des œuvres de la culture et en faire la matière d’une formation humaine en profondeur, capable de s’ouvrir à l’actualité sans s’aliéner à elle » (Pena-Ruiz Henri, « Qu’est-ce que l’école », Folio, 2005, p.19).
L’école démocratique donne du sens
La culture est une construction de l’homme. L’émancipation des élèves vient de la manière dont sont enseignés les savoirs (fondamentaux, transversaux) ; ces derniers doivent faire sens pour être compris et reproduits. Cette école favorise l’expérimentation, la découverte et l’exploration. Centrée sur l’apprenant, cette école conduit à générer des individualités tenant compte de leur histoire personnelle et sociale. Or, dans les faits, cette vision n’est pas toujours aussi simple à mettre en place, laissant de côté les plus fragiles socialement. Philippe Meirieu, interrogé à l’époque en tant que Président de l’IUFM de Lyon, ira jusqu’à constater que « nous avons démocratisé l’accès à l’Ecole, mais, faute d’un travail pédagogique suffisant, nous n’avons pas démocratisé la réussite dans l’Ecole ».
L’école française au regard des comparaisons internationales
Depuis 2000, les tests Pisa (programme international de suivi des acquis des élèves) mis en place par l’OCDE dressent un bilan mitigé de notre système éducatif. Ce programme souligne en particulier que les bonnes performances ne sont pas forcément fonction de l'investissement économique consenti dans les dépenses d'éducation, mais de l'efficacité des systèmes et de leur capacité à aider et intégrer les élèves d'origine modeste.
La démocratisation du système scolaire arrive-t-elle à ses limites ? Comment la collectivité doit s’investir pour relever le défi de l’éducation ; sur qui ou quoi peut-elle s’appuyer ?
Pourquoi l’école ne peut répondre à elle seule à l’enjeu d’éducation (la même éducation pour tous ou égalité des chances) ? Quels sont les facteurs ou difficultés extérieures qui constituent des freins à cet enjeu éducatif de l’école ?
La relation ville / école n’est pas uniforme sur l’ensemble des territoires, notamment dans l’agglomération lyonnaise. Plusieurs facteurs, au fil du temps, ont pris une ampleur inégale, creusant un peu plus chaque année, l’écart entre les villes. Dans l’agglomération lyonnaise, une étude a été réalisée par l’observatoire de la cohésion sociale, sur les actions locales en matière d’éducation.
Les défis de l’éducation font face à de nombreuses difficultés liées notamment :
Aux comportements sociaux
La montée des individualismes, de la violence, des communautarismes s’est invitée comme un acteur trouble, … troublant cette relation ville/école, conduisant les responsables politiques à mettre en place des zones d’éducation prioritaire, sur lesquelles doivent se porter plus d’attention, d’efforts et donc de moyens, sans garantie de résultat mais toujours d’actualité (dossier sur la relance des zones d’éducation prioritaire). Au premier rang des initiatives, on trouve le Comité départemental du Projet éducatif local qui pilote et finance tous les dispositifs éducatifs à l’échelle départementale (CEJ, PRE, CLAS, VVV, CEL, etc.).
A la donne économique
La réussite pour tous et ses perversions, la quête absolue d’un établissement parfait pour ses enfants sont les conséquences directes d’une société consumériste et tout entière préoccupée par le succès. La notion de marché de l’école est ainsi analysée et argumentée par François DUBET dans la Revue Urbanisme n° 340, dossier “Mixité, de janvier-février 2005. Les disparités de ce partage ont conduit à la disparition de la carte scolaire en permettant aux familles de choisir dès la rentrée 2009 leur établissement.
Au progrès technologique
Le haut débit, la généralisation de l’accès à Internet ont bouleversé le rapport ville / école et école / habitants. Ils tendent à gommer les distances en créant des raccourcis entre la connaissance et ses organisateurs. Au risque parfois de créer des différences en accentuant encore les inégalités géographiques de nos communes. Même s’il faut reconnaître les efforts engagés par le programme de la France numérique pour mailler la France « à grande vitesse » à l’horizon 2012.
Au facteur temps
Le rapport entre le temps passé, le temps vécu, le temps consacré à la pédagogie, à l’apprentissage, à l’acquisition des savoirs et des connaissances n’a cessé de subir des aménagements, toujours en lutte avec d’autres temps (celui des parents, de l’entreprise, des moyens de transports, de la mondialisation…). Tout cela conduit les villes à prendre des dispositifs pour proposer à leurs administrés des initiatives locales originales pour organiser, améliorer et optimiser les trajets maison / école (voir les cahiers éducation Millénaire 3 et en particulier le dossier « les temps de l’enfant »).
Le pédibus permet d’organiser des transports en « bus pédestres ». D’autres expériences de mobilité sont menées par les établissements scolaires de Neuville sur Saône et du 5ème arrondissement de Lyon. Celles-ci ont respectivement abouti à améliorer la relation ville école. Dans la même logique d'une meilleure adéquation entre les offres temporelles et les besoins - toujours plus variés - des habitants, a été conçu le guide des services de proximité.
Aux déplacements et trajectoires
Nombreuses études ont été menées pour définir ces trajectoires personnelles qui nous conduisent de l’école à notre lieu de travail sans nécessairement suivre une logique territoriale limitée à la ville de naissance (voir les indicateurs de ces parcours scolaires en France). La répartition géographique de l’offre éducative, tant en termes de niveaux que de spécialités de formation, joue également un rôle prépondérant sur les liens tissés entre territoires et parcours scolaires. Ceci est particulièrement vrai sur les territoires économiques du Grand Lyon dont les habitants n’ont pas tous le même parcours scolaires.
La territorialisation du système éducatif trouve écho dans un article du sociologue Jacques Donzelot qui distingue trois catégories de populations qui se séparent les unes des autres, selon lui, dans une dérive sécessionniste inquiétante : les minorités ethniques, les oubliés et les enrichis. Les effets des caractéristiques intrinsèques du lieu de résidence sur les relations à l’école semblent bel et bien inéluctables... La réputation éducative d’un lieu ou d’une ville serait déterminante dans les choix d’installation des familles et dans ceux d’implantation des activités économiques. Les capacités à éduquer, enseigner, former, qualifier, faire accéder à la culture, promouvoir l’esprit créatif, l’innovation, la recherche… sont autant de critères recherchés. Ceci est particulièrement vrai pour l’agglomération lyonnaise qui abrite des écoles ou des universités prestigieuses, regroupées depuis 2006 dans un Pôle de Recherche et d’enseignement supérieur (PRES) et dont Lionel Collet, son président évoque la constitution. La thématique « école, milieux et territoires » est aussi parfaitement développée dans les Cahiers pédagogiques au travers de multiples focus.
L’action éducative tentaculaire de l’Etat : la réussite pour tous
D’un côté, l’Etat s’engage pour une école vectrice d’égalité des chances devant permettre la réussite de tous les élèves quels que soient leurs conditions sociales, leur origine ethnique, leur religion ou leur lieu de résidence en métropole ou en outre-mer. De l’autre, les collectivités locales lui servent de support pour encadrer l’éducation. En prenant à leur charge les quatre niveaux de formations (maternelle, primaire, secondaire, universitaire), les académies avec le soutien des collectivités locales s’assurent de faire respecter la mission régulatrice de l’Etat en matière éducative.
Les attentes d’aujourd’hui vis-à-vis de l’école dépassent sans doute le cadre strict que la loi de Jules Ferry lui conférait. Interviewé en 2005 sur le sujet dans « Quel savoir minimum dispenser à l’école ? », Philippe Meirieu, professeur de pédagogie et directeur de l'IUFM de Lyon indiquait : « je n’abandonnerai jamais l’école, dès lors que je n’aurai pas la garantie qu’il n’existe à côté un ensemble d’institutions qui ait les mêmes principes d’équité au regard des savoirs et qui ne renvoient pas leur apprentissage à l’aléatoire des histoires individuelles ».
La politique éducative communale : une géographie très… instructive, une compétence encore secondaire
Depuis une vingtaine d’années, l’éducation n’apparaît plus seulement comme l’apanage de l’école, sous la responsabilité unique de l’Education nationale. On assiste en effet à une montée en puissance des villes dans le champ de l’éducation notamment par :
- Leurs compétences légales (code des collectivités locales)
- construction, répartition et entretien des écoles, achat du mobilier, et câblage informatique des salles de classe…
- mission de représentation pour assister aux conseils d’école où siègent le corps enseignant, les responsables administratifs et les représentants des parents d’élève
- préparation du temps fort de la rentrée scolaire (veiller à l’intégration de tous les enfants y compris ceux des gens du voyage, à tenir informés les parents, à assurer l’entretien et la sécurité des bâtiments, fournir les manuels et documents scolaires, réactiver les partenariats avec l’Education nationale et les associations locales)
- communication sur la vie de l’école (bulletin ou magazine municipal, brochures spécifiques aux temps scolaires des enfants),
- gestion de la restauration scolaire avec des professionnels de la cuisine collective, de l’accueil collectif et des laboratoires auditeurs en matière de santé publique.
Toute ville peut également décider de participer financièrement à l’organisation de classes dites transplantées (semaine au ski, initiations sportives, culturelles, gastronomiques, scientifiques…). Enfin, la ville est garante de la sécurité des entrées et sorties des classes dans chacune de ses écoles.
- Leur implication progressive dans le « contenu ».
Toujours pas de compétence propre en matière éducative ne signifie pas que les villes ne s’impliquent pas. De plus en plus souvent sollicitées par l’Education nationale, avec laquelle un partenariat plus fort s’est noué de fait, elles financent des actions en lien avec les projets d’école, ou ceux des Zones d’Education Prioritaire. De même, elles encouragent des activités dans les locaux de l’école (activités culturelles, sportives, liées à l’apprentissage des nouvelles technologies, etc.).
Comment les dispositifs légaux sont-ils investis par ces collectivités ?
Depuis la fin des années 1980, ce sont ainsi de très nombreuses procédures contractuelles qui interviennent dans le champ éducatif, et au sein desquelles les villes ont une place de choix. Les Contrats bleus, les Contrats d’Aménagement du Temps de l’Enfant, les Contrats Ville Enfance Jeunesse puis les Contrats d’Aménagement des rythmes de vie des enfants et des jeunes visent d’abord l’articulation des temps de l’école et des activités (sportives, artistiques, culturelles, etc.), la socialisation de l’enfant, son autonomisation, sa réussite scolaire.
Viennent ensuite les Contrats Educatifs Locaux et les Contrats Temps Libres, dispositifs qui sous l’impulsion de la Caisse Nationale d’Allocation Familiale, participent à structurer davantage encore le champ de l’éducation.
Aujourd’hui, l’ensemble de ces dispositifs est complété par la mise en œuvre du Programme de Réussite Educative. Financé en totalité par l’Etat, mais mis en œuvre par la communauté éducative locale composée de l’ensemble des partenaires éducatifs d’un territoire (Ville, Education nationale, Conseil général, centres sociaux, etc.), il se concrétise par la mise en place d’un parcours de réussite éducative adapté à chaque jeune, notamment les plus fragiles.
Désormais, dans les zones d’éducation dites prioritaires, il conviendrait de recentrer les efforts sur les zones les plus fragilisées et développer la logique de réseau comme cela semble être le fil conducteur du nouveau dispositif Ambition réussite. Dans un souci permanent de réussite scolaire, le Plan préconise d’adapter les parcours scolaires de chaque enfant et d’accompagner le projet d’orientation pour notamment multiplier les perspectives de l’élève. Tout ce nouveau dispositif est basé également sur l’association permanente des parents et des autres partenaires du milieu scolaire et périscolaire.
Ce postulat vient en écho du rapport de la Chambre régionale des Comptes sur les communes et l’école concluant en trois points sur les améliorations à porter au contenu et aux modalités d’application des politiques communales relatives à l’école :
- une nécessaire coordination des interventions de l’Etat et des communes à propos de l’école primaire
- la remise en cause du cadre territorial traditionnel de l’école
- la préservation de l’égalité des élèves devant le service public.
Partenariats et formation de tous : familles, associations, institutions, entreprises…
La tendance des collectivités tend vers une contractualisation des échanges avec les partenaires éducatifs que ce soit la famille « cellule de base de la société », les associations dites d’éducation populaire, les autres institutions (religieuses, culturelles,…) voire les entreprises, structures devant accueillir des citoyens formés et capables de contribuer a minima à la croissance économique. Des cas concrets, reconduits d’année en année, illustrent leur mécanisme en affichant des actions réelles.
La Fondation Entreprise Réussite Scolaire est l’exemple abouti d’un partenariat multiple entre acteurs de la ville et de l’éducation.
Pour l’agglomération lyonnaise, des dispositifs sont mis en œuvre pour intégrer les programmes d’accompagnement scolaire, pour développer des services publics complémentaires, des activités de loisirs, en liaison ou non avec des initiatives ou des partenariats proposés par l’Etat dans le cadre de la lutte contre l’échec scolaire, de la politique de la ville ou de la prévention de la délinquance.
Quelques exemples de dispositifs innovants
- projet de réussite éducative de la ville de Rillieux-la-Pape
- plan régional de lutte contre le décrochage scolaire et les sorties sans qualification de la région Rhône-Alpes.
- dispositif Demain en main de la région Rhône-Alpes
- le dispositif d’accompagnement vers la lecture de l’AFEV Lyon
- démarche de la MRIE face au décrochage scolaire : une réflexion croisée parents et professionnels
- comité départemental du projet éducatif local partenariat à l’échelle du département du Rhône
- l’exemple du pays Viennois comme agglomération initiatrice d’une vision intercommunale de l’éducation
Autant de témoignages montrant l’efficacité de la ville en tant qu’acteur clé de l’éducation, lorsque notamment elle s’investit sur les trois plans de l’éducation formelle, informelle et non formelle.
Le processus d’amélioration de l’environnement éducatif
Quelle que soit leur taille, les villes profitent des nouvelles technologies pour améliorer les inscriptions dans les centres de loisirs sans hébergement (CLSH) où sont accueillis les enfants en dehors des heures scolaires (juste avant, juste après) ainsi qu’à la cantine. Notamment par la mise en place des cartes ville (comme à Francheville Rhône). Ce sont des cartes à puce permettant de responsabiliser l’enfant et l’inciter à s’inscrire lui-même dans ses structures lors de son arrivée le matin.
Un autre processus de facilitateur de lien école / ville / éducation / citoyenneté, sont les conseils municipaux d’enfants. Par cet intermédiaire, les jeunes peuvent désormais s’exprimer, participer et agir dans leur cité.
L’école devient ainsi un équipement structurant, ouverte et fréquentée par tous, elle œuvre au développement et à l’attractivité de son territoire ou de son quartier d’implantation. La nouvelle loi d’orientation scolaire de 2009 vient, dans ce sens, d’élargir dans une certaine mesure les expérimentations en ZEP à tous les établissements scolaires, publics et privés, à travers la généralisation de « l’accompagnement éducatif » qui englobe aussi les activités extrascolaires de l’enfant.
Ce qui rendrait possibles d’autres actions de collectivités locales en matière d’éducation :
- Un rôle de mise en visibilité des démarches accomplies et des actions menées sur l’ensemble du territoire de l’agglomération ;
- Un rôle d’aide à l’approfondissement de démarches mises en œuvre notamment en apportant son ingénierie en matière de construction de processus de travail.
- Un rôle de facilitateur de processus, notamment au niveau politique, à l’échelle du territoire (c’est particulièrement vrai en termes d’éducation artistique et culturelle, sur cet axe là l’agglomération constituerait le bon niveau d’intervention et pourrait donner une véritable impulsion).
- Un rôle de catalyseur de partenariat sur la base de l’expérience et de la légitimité acquise en la matière par le Grand Lyon.
- Une prise en compte des territoires de vie des jeunes dans l’action publique
Education aux valeurs et à la citoyenneté
Dans un contexte de « pluriculturalisation » des effectifs scolaires, l'apprentissage du « vivre-ensemble » est devenu un objet de préoccupation socio-éducative majeure. C’est ce que Jean Hénaire, spécialiste en sciences de l'éducation à la Direction de la recherche au ministère de l'Éducation, appelle l’éducation aux valeurs et à la citoyenneté, tout comme il en est fait mention dans la synthèse éducation et démocratie à propos notamment de l’apprentissage du vivre ensemble et du lien social. Claude Baudoin, directeur du Centre Régional de Documentation Pédagogique (CRDP) et conseiller pour les technologies de l'information et de la communication dans l'enseignement (CTICE) considère ainsi comme liés les savoirs, savoir-faire, savoir-être. De même, la question des nouvelles technologies s’invite sans conteste dans le débat. Marie-Hélène Sauzéa, vice-présidente de Saint-Etienne Métropole en charge du « Plan multimédia dans les écoles » montre les avantages à préparer notre jeunesse à vivre dans cette (nouvelle) société du savoir par l’exigence du volet équipement et du volet pédagogique, tout en soulignant que le périmètre de l’intercommunalité profite notamment aux plus petites communes. Ce plan devrait s’étendre aussi aux enfants en situation de handicap.
La tendance actuelle montre que les villes s’impliquent dans l’éducation parce que l’on sait aussi aujourd’hui que la prospérité et le développement harmonieux d’une cité exigent une bonne santé sociale de ses habitants pour laquelle, évidemment, l’éducation joue un rôle déterminant. En articulant les actions éducatives, en montrant l’exemple elles-mêmes (signature de la charte des villes éducatrices) les villes contribuent à réguler le transfert des connaissances, améliorer les conditions d’apprentissage, favoriser l’interconnexion des savoirs, construire des lieux de rencontre des acteurs, des chercheurs, des enseignants, des élèves, des étudiants, des apprentis, des urbanistes, des responsables politiques délégués à l’éducation, tout en s’appuyant sur les moyens technologiques de communication pour croiser les dispositifs et permettre à chaque citoyen de mieux vivre. Au même titre que l’école délivre des passeports du savoir, l’agglomération lyonnaise est l’une des toutes premières collectivités à joindre politique publique et politique éducative en remettant depuis 2007 des passeports citoyens pour un apprentissage durable de toute la communauté.
Ville 2.0 : le libre échange et le partage des savoirs à l’heure du numérique
La ville emprunte à la Toile un champ lexical similaire. Adresse, navigateur, fenêtre, site, itinéraire, bibliothèque, centre ressources, autoroutes de l'information, autant d'espaces qui segmentent notre découverte du médium internet et de la ville éducative, l'accompagnent, définissent aussi in fine le "territoire" de l'Internet, celui-là même sur lequel l'on apprend à "se déplacer", apprentissage que l'on doit transmettre à nos enfants pour vivre ensemble de façon sereine. L’an 2000 a déjà donné l’occasion à de nombreux auteurs de se poser la question des liens futurs entre école, ville et réseaux internet donnant lieu à diverses réflexions au sujet des bénéfices des TIC, des éventuelles remises en cause de certaines disciplines, les transformations du système éducatif…Il est intéressant de (re)lire le Cahier Millénaire 3 n°18 conçu en 2000 intitulé « l’éducation saisie par les nouveaux médias ? » pour se donner une idée du chemin parcouru depuis !
Une ville, n'est-ce pas aussi un énorme site web ?
Joël de Rosnay, auteur de « 2020 : Scénarios du futur, comprendre le monde qui vient » paru en 2008 se le demande. Pour cet auteur, en effet, la capacité à s'informer et à partager est au cœur de la Cité. L’ensemble des réseaux, y compris sociaux, sur Internet, devrait s’accroître en proposant des ressources plus facilement accessibles. Quelles seront alors les conséquences pour les écoles maternelles, primaires, les collèges, les lycées, les centres d’apprentis ? Quels changements interviendront dans les relations entre enseignants et élèves ? Sous l’angle du lien entre enseignant /élève / numérique, un début de réponse à lire dans l’interview d’Alexandre Bonucci qui suggère le renforcement du rôle de l’enseignant face à la masse d’information dans laquelle nous risquons de nous noyer ; l’enseignant restant au cœur du processus éducatif.
La ville de plus en plus construite en réseau éducatif
Avec les programmes "Écoles numériques rurales", "Cyber-base École" ou encore "Opération TBI", la question de l'équipement numérique des écoles trouve aujourd'hui des réponses. Mais qu'en est-il du développement des usages et de l'accompagnement des usagers ? Quelles sont les démarches urbaines pertinentes pour garantir une généralisation de l'usage des TICE dans les écoles ? Sur quel échelon géographique ? Quel est le partage des rôles et des responsabilités entre les collectivités et l'Éducation nationale ? Lors des rencontres des Interconnectés soutenues par le Grand Lyon, des structures intercommunales (élus et agents) et entreprises, approfondissent leurs connaissances en matières d’offres technologiques, échangent sur leurs expériences et partagent leurs besoins et visions.
L’agglomération lyonnaise a déployé 15 dispositifs éducatifs permettant de contribuer à l’éducation collective : eau, projets urbains, qualité de l’air, espaces naturels, écocitoyenneté, environnement sonore, solidarité internationale, gestion des déchets… D’autres collectivités s’engagent à soutenir des projets de rapprochement ville école. C’est le cas des labels Ville internet, ou plus récemment Ecole internet. Les expériences de rapprochement école et internet sont récompensées par le label Ecole internet destiné à promouvoir les usages d’Internet dans le cadre d’une égalité d’accès et d’appropriation pour tous les élèves des écoles du premier cycle. En 2009, sur 57 villes récompensées, au moins 5 de Rhône-Alpes ont été distinguées.
La ville change et vite, grâce aux nouveaux outils de communication. Elle devient numérique et propose des données en temps réel, des échanges rapides via des plateformes collaboratrices, des lieux d'échange à distance. Ainsi, le Grand Lyon s'est inscrit pour participer au programme "Cluster Green and Connected Cities" organisé par l'association communication et information sur le développement durable (www.acidd.com).
Soutien des villes aux pratiques innovantes dans le champ de l’éducation
Côté établissements scolaires
De nouvelles réponses témoignent de pratiques innovantes dans le champ de l’éducation, tant en termes de pédagogie, d’organisation ou encore de partenariat (avec les collectivités locales ou le monde économique). C’est le cas notamment des écoles de la 2ème chance, du CLEPT de Grenoble ou des Missions Générales d’Insertion. (le point !)
Côté partenaires
Il faut noter les actions éducatives des télévisions locales comme Cap Canal, ou les expériences terrain originales : Ebulliscience® pour le développement de la culture scientifique et technique du grand public, la Péniche de l'environnement pour enseigner et responsabiliser les jeunes sur l'environnement tout en naviguant, l’Espace Pandora qui œuvre au renforcement des lieux, du livre et de la lecture (publique), le réseau d’acteurs d’éducation à l’environnement urbain Citéphile pour apprendre et vivre ensemble la ville.
Côté territoires
Pour Yves Fournel, Adjoint au Maire délégué à l'éducation et à la petite enfance de la Ville de Lyon, ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est l’implication consciente et volontaire des villes en tant qu’entités politico-administratives dans l’éducation de l’enfant, du jeune, et plus largement de l’ensemble de ses habitants. « Une ville éducatrice, c’est une ville qui prend conscience qu’elle constitue une source d’éducation en elle-même, à partir des sphères multiples sur lesquelles elle intervient (la planification urbaine, le sport, la culture, la politique de la ville, etc.) et qui inscrit cette exigence d’éducation dans ses projets. C’est une commune qui s’engage à enrichir la vie de ses habitants, à les informer, à les former tout au long de la vie, à les consulter, pour leur donner les outils et les moyens de s’épanouir et de participer à la construction du monde de demain ».
La mise en place depuis 2001 d’une veille éducative chargée de repérer au plus tôt les élèves en difficultés permet de leur proposer soit une formation plus adaptée soit une insertion professionnelle.
Vers une politique de réaménagement du territoire éducatif.
Quels sont donc les facteurs porteurs d'enjeux pour l'avenir en matière d'éducation ? Outre la nécessaire prise en compte du contexte local et l'indispensable définition d'objectifs partagés par tous les acteurs concernés, l'Institut National de la Recherche Pédagogique dans un de ses dossiers, en compte six :
- l'ergonomie éducative ;
- l'évolution de l'acte et des pratiques liées notamment aux nouvelles technologies de l'information et de la communication ;
- la cohérence entre les temps et les valeurs éducatives des divers acteurs ;
- la mise en réseau des structures et des acteurs (intercommunalité rurale et réseaux urbains) ;
- la connaissance et l'intégration des différences ;
-les stratégies éducatives des acteurs relatives aux choix des individus, des familles et des groupes par rapport à la question de l'éducation.
Accusée parfois d’être à l’origine d’un système éducatif ségrégatif, la ville trouvera désormais plus efficace de s’engager vers une politique d’aménagement du territoire éducatif…sachant mieux associer politique urbaine et politique éducative.
Interview de Michel Desmurget
directeur de recherches en neurosciences à l'INSERM, à l'Institut des Sciences Cognitives Marc Jeannerod
Étude
Lorsque les contraintes ne permettent plus aux professionnels de surmonter les aléas, quelle place donnée à l’autonomie et au collectif de travail pour affronter les difficultés ?
Étude
De nombreux dispositifs sont mis en place pour lutter contre le décrochage scolaire ; mais quelles difficultés sont encore perçues par les acteurs au contact des collégiens ?
Étude
Repérages et analyses des différentes actions mises en œuvres pour la prévention du décrochage scolaire.
Article
De 1762 à 2003, retour sur les grandes dates de l'enseignement supérieur à Lyon.
Texte d'auteur
De 1978 à 2003, retour sur les grandes étapes de Lyon, métropole innovante dans le domaine de l'éducation.
Interview de Martin Durigneux
Co-fondateur de l'Institut Transitions
Étude
L’École doit-elle être ouverte à son environnement social ou au contraire tenir à distance les autres espaces de vie que sont la famille, le quartier et la ville ?
Étude
Pour aider les travailleurs sociaux en accompagnement éducatif du territoire de Vénissieux et Saint-Fons à faire face aux situations professionnelles critiques.